Au 225ème, premiers galons

Publié le par journaldeguerre14-18.over-blog.com

Cette occasion nous fut offerte d'une façon fort simple lors de la dissolution du 336ème. La fatigue et les pertes en hommes et officiers contraignirent la 60ème division à procéder au regroupement des unités, notre bataillon venant compléter les effectifs du 225ème régiment d'infanterie ; Joseph et moi fûmes tous deux versés à la 21ème compagnie.

 

Après quelque temps passé dans un village de l'arrière pour organiser la fusion, mettre chacun à sa place et adapter les hommes à leur nouvelle formation, nous avons été l'un et l'autre l'objet de promotions flatteuses ! Joseph était nommé adjudant et moi caporal fourrier. Je fus plus spécialement fier d'arborer ces premiers galons : 2 noirs au bas des manches et 1 doré au-dessus du coude et je me trouvais d'un seul coup assimilé aux sous-officiers, faisant popote avec ceux-ci. Cette fonction en temps normal est celle d'un bureaucrate qui, avec le sergent major et le sergent fourrier, établit les états pour rendre compte et pourvoir aux besoins matériels de la compagnie. Mais sur la ligne de combat, le caporal fourrier se trouve plus spécialement attaché à la personne du commandant de compagnie et sa dépendance directe pour transmettre les ordres et assurer les liaisons.

 

Notre repos avait préludé à notre première montée à Verdun et j'ai connu sans tarder les nouvelles fonctions auxquelles j'étais appelé. Elles présentèrent pour moi un intérêt de participation et de connaissance, une part de responsabilité mais aussi de danger immédiat du combat.


58b--original-58a-.jpgGustave Curti dit "Tatave, la terreur des Boches"

 

Mon sergent major, un niçois au nom de Gustave Curti avait la nonchalance, l'esprit et l'accent méridional. Nous l'appelions « Tatave... ». C'était un fort brave type et un militaire assez trouillard. Quant au sergent fourrier, instituteur de son état, excellent bureaucrate, il avait des pressentiments qui se confirmèrent bien vite. Mon commandant de compagnie était le lieutenant Lemainais. Ingénieur dans le civil, c'était un officier énergique à l'esprit précis et réfléchi. Je m'y attachais rapidement et en maintes circonstances, il me manifesta son estime. Le 225ème régiment d'infanterie avait pour chef le colonel Roob.


61a.jpgLe Grand-Père

Colonel Roob, Commandant le 225ème Régiment d'Infanterie

 

Rassemblée dans la région de Revigny, notre division se trouva embarquée dans des camions qui au long de la « Voie sacrée », nous acheminèrent vers la bataille. J'ai le souvenir d'un défilé incessant de convois qui se suivent et se croisent sur la route défoncée que des territoriaux entretiennent au mieux en bouchant les trous. Ceux qui montent ne peuvent s'empêcher d'envier ceux qui descendent. Eux du moins en reviennent... Qu'en sera-t-il de nous ? Combien feront le chemin du retour ? Au fur et à mesure qu'on approche de la ville, on entend dans le lointain le roulement sourd de la canonnade ininterrompue. À la réflexion, on est surpris que cette route importante d'accès à Verdun n’ait été rendue inutilisable par des bombardements allemands. Si quelques camions renversés gisent le long des fossés, la circulation intense se poursuit jour et nuit et la rocade qui a bien mérité son nom de « Voie Sacrée » a rempli son office pendant la bataille.

 

C'est ainsi que nous débarquerons sans encombre dans un petit bois aux environs du fort du Regret. Le regroupement du régiment effectué, nous quittons ce refuge au nom symbolique pour gagner la Citadelle. La Citadelle, c'est une énorme caserne souterraine qui sert à la fois d’étape de ravitaillement, de dépôt de matériels, abrite des états-majors, des bureaux régimentaires, les postes de secours et des troupes territoriales et où l'on rencontre pêle-mêle des soldats de toutes provenances. Par de longs couloirs, on accède à de grandes salles voûtées où se font les rassemblements dans un brouhaha et une confusion de capharnaüm. La compagnie est groupée dans l'une d'elles et je suis chargé de procéder à des distributions de biscuits, de conserves, de munitions, ce qui me donne conscience de mes premières responsabilités.

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