Noël aux tranchées - Première partie

Publié le par journaldeguerre14-18.over-blog.com

Une heureuse détente se produisit dans la première nuit de Noël passée au front. On ne pouvait s'empêcher de penser aux joyeuses veillées d'autrefois et beaucoup de gars avaient l'esprit tendu vers les églises des villes et des villages où femmes et enfants assistant à la messe de minuit, priaient pour leurs combattants.

 

Tout à coup à cette heure-là, on entendit se lever dans le silence de la nuit une voix forte qui chantait les paroles du vieux cantique :

 

« Les anges dans les campagnes

Ont entonné l’hymne des cieux

Et l’écho des montagnes

Redit pour nous le chant joyeux »

 

Transportés de ferveur, les poilus reprirent le refrain que chacun savait :

 

« Glo o.o.o.o.o.

o.o.o.o.o.

o.o.o.o.o ria

In excelsis Deo (bis) »

 

Les soldats allemands s'étaient levés au-dessus de leurs tranchées et se firent entendre à leur tour, chantant en coeur comme ils savent le faire des hymnes religieux.

 

Puis l'audacieux capitaine Germain, initiateur de la manifestation, qui avait apporté son violon, grimpa sur le plateau entre les lignes ennemies et joua le « Minuit Chrétien » repris par les troupiers. On pouvait imaginer ce soir-là que « la Paix sur terre aux hommes de bonne volonté » était revenue parmi nous. Et la trêve fut respectée toute la nuit.

 

N'est-ce pas un beau conte de Noël auquel j'ai pu assister sur la butte de Souain. Cela hélas ne pouvait pas durer et la guerre repris son cours avec des attaques partielles organisées activement sans préparation d'artillerie et toujours vouées à l’échec. Les compagnies du bataillon alertées tour à tour en firent la lourde expérience et l'une d'elles connut des événements dramatiques.


 

37a

 

Commandant de la 60ème Division

Le Général Reveilhac, dit "Pipe en bois"

 

Le général Reveilhac, surnommé « pipe en bois » qui de Suippes commandait la division ordonna aux rescapés d'une compagnie de refaire du jour au lendemain leur attaque manquée la veille. Ayant laissé beaucoup des leurs sur le terrain et sachant l'impossibilité d'atteindre l'objectif fixé, les fils de fer et les réseaux de barbelés n'étant pas détruits, les soldats avaient décidé de ne pas sortir de la tranchée. Seuls les chefs de section et sous-officiers franchirent le parapet mais ils ne furent pas suivis par la troupe. Cette protestation collective fut considérée en haut lieu comme « un refus d'obéissance devant l'ennemi ».

 

Elle fut brutalement réprimée et les caporaux de la compagnie incriminée furent traduits devant le conseil de guerre. Malgré la courageuse défense de leurs officiers et d'un adjudant, ils furent condamnés à mort et fusillés. J'ai assisté avec le régiment rassemblé à cette exécution qui ne servit pas relever le moral de la troupe. Le choix arbitraire des caporaux et le jugement infamant furent toujours contestés et après la guerre, un tribunal réhabilita les condamnés, mais ils étaient morts couvert d'une honte imméritée.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article